mercredi 16 novembre 2011

Lost highway

Une dernière caresse au chat et à ses grands yeux bleus qui ne savent pas. Je ferme la porte en prenant bien soin de ne pas la faire sortir et pousse la clef dans la boite aux lettres. Plus moyen de revenir en arrière désormais. Un dernier effort pour déposer lourdement une valise plus grosse que moi dans mon tout petit coffre. Je considère longuement le ciel bleu mais un coup de vent glacial me ramène à moi. Je me glisse derrière le volant, attache ma ceinture, et branche le GPS. Le moteur gronde doucement. Un dernier coup d'oeil dans le rétro. J'ai la boule au ventre, comme toujours. Je ne sais plus bien différencier l'aller du retour. Dans les deux cas, je laisse quelque chose d'important derrière moi. Ça me fatigue. 

Mes parents sont partis au travail avant mon départ, une heure plus tôt. C'était presque un soulagement. C'était moins dur. Moins dur de faire semblant, de faire croire que ça ne me fait ni chaud ni froid, que je m'en fous de sans arrêt dire au revoir et à je-ne-sais-pas-quand. Toute la pudeur du monde et deux bises chacun. Pas d'élan de tendresse, pas de mot doux. Ma saleté de fierté. "Salut, je vous envoie un message en arrivant". Je serre les dents, me mords la langue et retiens la mini-larme un peu traître qui se pointe au coin de mon oeil. Je sais qu'ils font pareil. Pour moi.

Le temps de remonter la rue, sortir du quartier et ne plus distinguer qu'une grande ligne droite entourée d'arbres et de panneaux rouges et blancs. Le truc dans mon ventre se dénoue petit à petit. Je me concentre sur la route, sur ma vitesse. Je monte le son et je disparais à 300 km de là. Les aires d'autoroute et les sorties numérotées se succèdent. Je les connais par coeur. Elles n'ont pas d'identité, elles ne sont ni là ni là-bas. Je peux aller partout. Je ne le fais jamais.

Ça me fatigue.




7 commentaires:

  1. Tu le sais, je compatis énormément. Courage. Ce qui t'attend est super aussi après tout!

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  2. Ce n'est jamais simple de partir quand on en a pas vraiment envie... (même si je ne comprends pas totalement ton texte :-)
    Courage

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  3. Zofia >> Pour t'éclairer, je suis entre deux "maisons". Mes parents et mon frère d'un côté et mon copain de l'autre, qui est dans un studio provisoire à 300km de là. Toujours pas de vrai chez moi/chez nous en définitif. Les trajets réguliers, les valises jamais totalement défaites. Ca commence à durer.

    Nathan >> Maintenant que je suis arrivée, ça va mieux. Jusqu'au prochain départ.

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  4. Hum oui ce n'est jamais simple de bouger sans cesse comme ça, le sac toujours à moitié défait dans un coin et l'impression de ne pas avoir de véritable chez soi. Ca fait combien de temps que tu fais ces trajets ?

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  5. Zofia >> Ca fait presque 2 ans et demi maintenant. Mais là c'est encore pire car je n'ai plus rien (ni études, ni boulot).

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  6. Magnifique texte.
    Je ne saurais dire pourquoi exactement mais c'est très bien écrit ^^

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  7. Ça commence à faire long... pourquoi tu ne déménages pas définitivement chez ton copain ? (j'suis peut-être indiscrète n'hésites pas à me dire si j'abuse)

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