A Helsinki, la nuit dure trois
heures. Un soleil lourd alterne avec de brûlantes averses en cette fin de juin.
Les athlètes tâtent de leurs pointes le rouge ocre de la piste. D’autres posent
le nez en l’air, à l’affût du sens et de la force du vent. Ils se jaugent,
feintant la décontraction, allumant la caméra qui, couloir par couloir, dessine
le profil des concurrents. Il faut montrer le maillot, faire défiler les
sponsors qui sculptent les corps aux muscles saillants. On retire le jogging et
la veste pour les placer dans la « bassine vestiaire ». Passer à
autre chose, rentrer dans sa course. Apprécier son mètre vingt-deux de couloir.
On your mark
Les athlètes détendent leur cou, à
droite puis à gauche. Ils sautillent et claquent leurs cuisses avant de poser
leurs dix doigts derrière la ligne. Le starter désarme les tribunes d’un « sshhhhh »
allongé et decrescendo. Les jambes pliées, le genou à terre et les chaussures
dans les blocks, les athlètes se
connectent à la piste. Certains embrassent une croix en or avant de la glisser
sous leur maillot pendant que leurs voisins dissimulent leur adrénaline derrière
de grandes lunettes noires et une coiffure déconcertante.
Set
Les corps se déséquilibrent et
les muscles se tendent. Ce qui se passe dans la tête des sprinters reste un mystère individuel. De la
prière basse à la crainte du faux départ, de l’envie folle de l’oustider à la
pression démesurée du favori. Un seul but, cent mètres plus loin.
*PAN*
Les athlètes se soulèvent et
jaillissent dans un mouvement général. La machine déroule cinq longues foulées par
seconde dans une course au souffle coupé. A peine dix secondes d’appuis et de
suspensions. Ces interminables dix secondes et pour quelques centièmes celui qui
se détache et arrache la médaille du cou de ses concurrents dans un dernier cassé inespéré. Le torse en avant. Sur
la ligne, certains s’écroulent quand d’autres résignés ont déjà relâché leur
effort.
Le champion exulte, s’enroule
des couleurs de son drapeau et rassemble la foule dans un dernier tour de piste, sous la
clameur des tribunes saluant le prodige.
A Helsinki, la nuit dure trois
heures. La victoire, elle, dure toujours.
Si tu es là bas il faut absolument voir le Kiasma, le musée d'art contemporain. Cet endroit est complètement fou, je n'ai jamais rien vu de tel :)
RépondreSupprimerUne manière de vivre le 100 mètres comme on en pas souvent l'occasion... très beau
RépondreSupprimerAvant l'averse >> Oh non, malheureusement, je n'ai pas eu la chance d'y aller, j'ai suivi tout ça de très (trop) loin.
RépondreSupprimerMerci Zofia :)
Très joli sujet, mais je chipote un peu : 1m24, le couloir^^
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